Page:Houssaye - Souvenirs de jeunesse, 1830-1850.djvu/137

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un grand homme. Le premier venu, quelque peu doué d’esprit et de raison, le battait dans la causerie, à moins qu’il ne fût pris d’une inspiration soudaine ; mais alors c’était le dieu qui réapparaissait.

Par malheur, il n’y a pas de portrait du dieu Lamartine. C’est qu’il ne s’est pas trouvé un grand artiste pour saisir l’heure et le moment. Son portrait par Decaisne manquait de tout. Il était, d’ailleurs, en harmonie avec l’ameublement de cet intérieur notarial : partout, de pur acajou, dans la forme la plus discordante. « N’est-ce pas, disait-il, que ma chambre est la cellule d’un cénobite ? » Je me demandais comment il pouvait cueillir une pensée et trouver un vers sur ce prosaïque bureau à casiers ? Mais il avait d’autres inspirateurs, tout un bataillon de chiens et toute une tribu d’oiseaux. Il me fit un jour l’honneur de me présenter à sa perruche, une babillarde sempiternelle, qui n’avait jamais fini de lui conter ses histoires.