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MINGAN — POINTE-AUX-ESQUIMAUX

(Je confesse volontiers que je manque de l’énergie qu’il faudrait pour ne pas continuer la citation) « À la guerre, on regarde comme une gloire d’avoir vu tomber un ou deux chevaux sous soi, pendant la bataille ; pour moi, je ne sais si c’est une gloire, mais j’ai vu tomber deux de mes guides à l’eau ! L’un est tombé tout seul en sondant la glace en avant ; et je l’ai aidé à se tirer de là. L’autre y est tombé avec moi ; mais heureusement nous ne nous sommes pas mouillés : pour cela il faut être vif. »

Je crois que maintenant le lecteur connaît assez bien M. le G. V. Gendron : il est d’une originalité du meilleur aloi, et d’une gaieté qui jamais ne se dément. Cet homme, de la plus aimable simplicité, est aussi l’humilité même ; et je risque fort d’avoir à jamais perdu son amitié, pour avoir commis tant d’indiscrétions à son sujet.

À tout seigneur tout honneur.

Ayant à dire tant de choses de la Pointe-aux-Esquimaux, il fallait parler d’abord du premier citoyen du lieu, et je ne regrette pas de l’avoir fait.

Samedi, 13 juillet. — Et les Esquimaux ?

— Quels Esquimaux ?

— Mais les Esquimaux de la Pointe-aux-Esquimaux, donc !

— Eh bien ! Si l’on s’imagine qu’il suffise de venir en ce lieu pour voir des Esquimaux, on se fait bien illusion. Il n’y a pas plus d’Esquimaux ici qu’il n’y en a à l’intérieur des puissantes murailles de Québec ; et l’on sait que s’il est un endroit où il n’y en a pas, c’est bien celui-là.

Il n’y a donc ici d’esquimau que dans le nom de ce village. Mais d’où vient cette dénomination ? Elle vient, à n’en pouvoir douter, des Esquimaux qui jadis habitaient ou du moins fréquentaient ce territoire. Ce nom de Pointe-aux-Esquimaux, et celui de la baie des Esquimaux, sur la côte de l’Atlantique, rappellent et rappelleront toujours le souvenir des anciens habitants de cette terre du Labrador.