n’avoir affaire, au fond, qu’à des espèces d’illuminations et d’extases. L’imagination grossirait-elle un seul trait du cérémonial un peu accusé, que cela suffirait à faire confondre les réalités rituelles avec les fantasmagories du monde des esprits. Aussi, de même que nous avons pu penser que des rites pratiqués par d’autres magiciens se mêlaient à certaines révélations soi-disant pures, de même nous verrons ici de nombreux rêves, des images touffues recouvrir, dans l’esprit du récipiendaire, les traitements auxquels il se soumet.
Le cas le plus typique, dans cet ordre de faits, est celui de l’initiation chez les Warramunga, le plus typique, sinon malheureusement le mieux décrit[1]. L’initiation n’est pas faite par les magiciens de la tribu elle-même, mais par de vieux magiciens de la tribu voisine des Worgaia[2]. Ceux-ci sont dits posséder non seulement les formules et les substances nécessaires, mais encore les esprits, du genre du serpent[3], et aussi, et surtout, les petits bâtons mystérieux, résidus d’ancêtres de l’Alcheringa (les temps mythiques), appelés Kupitja, et que le magicien porte d’ordinaire à travers ses narines[4]. Actuellement, c’est un Worgaia fort célèbre, maître de nombreux élèves, qui initie les praticiens Warramunga[5]. Les candidats doivent ne prendre aucun repos ; ils sont obligés de rester debout ou de marcher jusqu’à ce qu’ils soient complètement épuisés et sachent à peine ce qui leur arrive. Ils ne doivent ni boire une goutte d’eau, ni goûter d’aucun aliment. En fait, « ils arrivent à être tout abasourdis et stupéfiés et, dans cet état,
- ↑ Spencer et Gillen, N. T. C., p. 484, 485.
- ↑ Les Worgaia initient aussi les Kalkadoon aux rites de la fabrication de la pluie, voir Roth, Superstition, p. 10. Ce cas d’origine étrangère de la tradition magique est des plus nets. Cf. Hubert et Mauss, Théorie de la magie, p. 26.
- ↑ N. T. C., p. 481, 485
- ↑ Sur les Kupitja, voir N. T. C., p. 484, 485, n., 486 (Cf. fig. 132, p. 483).
- ↑ N. T. C., p. 485.