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de l’attention, dont elle est l’objet dans certains cas, montre bien quel prix on y attache et quelle efficacité religieuse on lui suppose. Ainsi, la détermination de la date de Pâques a été l’une des préoccupations centrales du christianisme naissant. La Pâque chrétienne, qui perpétuait, d’une part, la Pâque juive et le sacrifice pascal, de l’autre, le sacrifice du Calvaire et la résurrection du Christ, devait être célébrée exactement au même point du temps que les faits qu’elle reproduisait, c’est-à-dire en un point exactement symétrique à celui où ils s’étaient d’abord produits. Problème délicat ! puisqu’il fallait trouver ces points symétriques dans deux calendriers différents et dont le désaccord variable ne pouvait être calculé rigoureusement. Au choix d’une solution approximative on apporta des scrupules infinis[1].

Le dimanche hebdomadaire commémore, c’est-à-dire renouvelle avec moins de solennité, mais autant d’efficacité que la fête annuelle de Pâques, le sacrifice du Christ. Ce que le dimanche est à Pâques, la semaine l’est à l’année et, dans la mesure où l’année représente le cours entier du temps, la semaine le représente[2]. Dans l’Inde, les douze premiers jours du mois équivalaient aux douze mois qui suivent ; en effet, un sacrifice continu, se développant au long de ces douze jours, était l’équivalent d’un semblable sacrifice qui aurait duré l’année tout entière ; il valait pour cette même année[3].

Lorsque toutes les équivalences possibles sont entrées en jeu, le temps finit par être représenté comme une suite de points équivalents, équivalant eux-mêmes aux intervalles qui les séparent, lesquels s’équivalent entre eux, et comme

  1. H. Kellner, Heortologie, p. 26 sq.
  2. H. Kellner, o. l., p. 26 sq.
  3. A. Weber, Omina et Portenta, p. 388 ; Indische Studien, XVII, p. 224 ; Sitzungsberichte d. kgl. pr. Ak. d. Wiss. zu Berlin, ph. h. Kl., 1898, XXXVII, 2 sq. Nous n’admettons pas l’équivalence proposée par Weber entre ces douze premiers jours de tous les mois et le Dodekahemeron de l’année chrétienne.