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Page:Hubert - La Torture aux Pays-Bas autrichiens pendant le XVIIIe siècle.djvu/98

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et des peines : « Vel reus de crimine ipso est plené convictus, vel non. Si sit convictus, crimenque plené probatum, reus tormentis subjiciendus non est ut confessio ab ipso extorqueatur : cùm ad condemnationem confessio necessaria non sit ubi aliunde de veritate commissi criminis sufficienter constat[1] ».

Et cependant, nous le constaterons dans le chapitre suivant, les doctrines abolitionnistes rencontrèrent dans les Pays-Bas autrichiens une hostilité opiniâtre, qui dura jusqu’à la fin de l’ancien régime. Comment l’influence d’un juriste aussi renommé que Van Espen n’a-t-elle pas produit d’effet plus sensible ? Ed. Poullet a parfaitement rendu compte de ce fait étrange : Van Espen, dit-il, écrivait en latin ; Van Espen produisait ces énormes in-folio, chers à l’homme d’étude, redoutables à l’homme du monde et presque inutiles à l’homme d’État. Van Espen raisonnait juste, mais il n’avait pas ces accents chaleureux qui émeuvent l’opinion publique. Van Espen n’affirmait pas : et qui peut espérer de former une école, de créer des disciples sans affirmer hautement sa pensée ? Van Espen avait vu ce que vit plus tard Beccaria ; mais il ne peut évidemment être considéré comme un réformateur. Tout ce qu’il y eut de radical dans les réformes tentées en matière criminelle fut, en Belgique, le produit des influences extérieures, et lorsque le Gouvernement voulut agir, il se heurta contre l’opposition presque unanime des corps judiciaires[2].

L’évolution des doctrines criminalistes, que nous avons étudiée depuis ses débuts au XVIe siècle, est accomplie au siècle dernier, au moins en Italie, en France et en Allemagne. Les Pays-Bas y sont demeurés pour ainsi dire étrangers, et nous allons voir maintenant les ministres autrichiens réformateurs aux prises avec nos tribunaux, défenseurs obstinés des institutions anciennes.


  1. Pars III, tit. VIII de instructione causarum criminalium, chap. III de examine rei et de tortura, no 31, t. II, p. 324 de l’éd. de Louvain de 1753.
  2. Hist. du droit pénal en Brabant, t. II, p. 473.