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Page:Hubert - Les Îles de la Madeleine et les Madelinots, 1926.djvu/86

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ces échecs calmaient les esprits et domptaient les volontés. Le seigneur se fit plus conciliant et les Acadiens moins têtus. Ils consentirent à prendre des baux de 999 ans. C’était trop fort. Coffin leur en offrit pour 99 ans. Nenni ! Ces terres nous appartiennent depuis la conquête : vous voulez nous les enlever et nous forcer, par dessus le marché, à vous payer une rente annuelle, il est juste et raisonnable qu’au moins nous posions les conditions.

La rente que l’amiral voulait établir était la même pour tous, sans égard à l’étendue de la propriété.[1]

L’abbé Allain écrit à Monseigneur Burk en 1808 : « Si on fait quelques démarches à son sujet (Coffin) auprès de l’autorité, ce n’est pas qu’on lui contestât ses droits ou privilèges qui ont paru extraordinaires, c’est que l’habitant ne se trouvait pas en état de supporter les charges qu’il prétendait établir et qui ont été bien modérées par la suite. » Si on examine cette question avec les yeux et l’esprit du jour, on comprendra peut-être difficilement, à première vue, que deux quintaux de morue soient une redevance exorbitante. Cependant, ce serait aujourd’hui le joli montant de $15.00, au moins, par année, pour jouir de quelques acres de terre ou d’un morceau de rivage. Si les cultivateurs établis sur les seigneuries des comtés de Rimouski et de

  1. Il y avait cependant quelques exceptions : Quand Sir Isaac Coffin, conduisant Lord Dorchester à Québec, arriva en vue des Îles, le temps n’était pas clair, ni le ciel serein, mais les nuages roulaient avec violence et une furieuse tempête s’annonçait. Coffin jugea bon de chercher un abri, mais il ne connaissait pas les Îles. Ayant eut la chance, avant le mauvais temps, d’aller à terre, il prit pour pilote un nommé Germain Arsenault qui lui évita beaucoup de désagrément.

    Une fois propriétaire de l’archipel, Coffin se souvint de Germain Arseneault et, pour lui prouver sa gratitude, lui accorda le privilège, à lui et aux siens, de prendre toute la terre qu’ils voudraient à une rente bien minime. (Hipp. Thériault). C’est probablement une explication à la remarque de Faucher de Saint-Maurice : « Plusieurs d’entre eux ont cent acres en état de culture pour lesquelles ils ne payent annuellement que quinze chelings ou un quintal de morue. Ce sont les rois de l’archipel ceux-là, et ils font bien des envieux autour d’eux. »
    Op. cit. p. 193.