Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/362

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les Tartares emploient plus fréquemment la ponction et les incisions sur diverses parties du corps. Quelquefois ils font ces opérations d'une manière vraiment risible. Un jour que nous avions dressé notre tente à côté d'une habitation mongole, un Tartare conduisit au chef de cette famille une vache, qui ne mangeait plus, disait-il, et qui allait tous les jours dépérissant. Le chef de famille examina l'animal ; il lui entr'ouvrit la bouche, et puis lui gratta les dents de devant avec son ongle. — Ignorant, dit-il à celui qui était venu le consulter, pourquoi as-tu attendu si longtemps à venir ? ta vache est sur le point de mourir ; elle a, tout au plus, une journée à vivre. Pourtant il reste encore un moyen, je vais l'essayer. Si ta vache meurt, tu diras que c'est ta faute ; si elle guérit, tu diras que c'est un grand bienfait d'Hormousdha et de mon savoir faire, ... Il appela ensuite quelques-uns de ses esclaves, et leur commanda de tenir fortement la bête, pendant qu'il lui ferait l'opération. Pour lui, il rentra dans sa tente, et revint bientôt après, armé d'un clou en fer et d'un gros marteau. Nous attendions avec impatience cette singulière opération chirurgicale, qui allait se faire avec un clou et un marteau. Pendant que plusieurs Mongols tenaient fortement la vache pour l'empêcher de s'échapper, l'opérateur lui plaça le clou sous le ventre, puis, d'un rude coup de marteau, il l'enfonça jusqu'à la tête. Après cela, il saisit de ses deux mains la queue de la vache et ordonna à ceux qui la tenaient de lâcher prise. Aussitôt la bête qui venait d'être si bizarrement opérée, se mit à courir, traînant après elle le vétérinaire tartare toujours cramponné à sa queue. Ils parcoururent de la sorte, à peu près un li de chemin. Le Tartire