Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/40

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chargé nos chameaux, nous nous remîmes en marche. Nous étions toujours sur le plateau de la Bonne montagne, Bientôt nous nous trouvâmes en présence du grand obo, au pied duquel les Tartares viennent adorer l’esprit de la montagne. Ce monument n’est autre chose qu’un énorme tas de pierres amoncelées sans ordre. A la base est une grande urne de granit dans laquelle on brûle de l’encens. Le sommet est couronné d’un grand nombre de branches desséchées, fixées au hasard parmi les pierres. Au-dessus de ces branches sont suspendus des ossements et des banderolles, chamarrés de sentences thibétaines ou mongoles. Les dévots qui passent devant l’obo ne se contentent pas de faire des prostrations et de brûler des parfums, ils jettent encore de l’argent en assez grande quantité sur ce tas de pierres. Les Chinois qui passent par cette route, ne manquent pas non plus de s’arrêter devant l’obo ; mais après avoir fait quelques génuflexions, ils ont soin de recueillir les offrandes que les Mongols ont eu la bonhomie d’y déposer.

Dans toutes les contrées de la Tartarie on rencontre fréquemment de ces monuments informes ; toutes les montagnes en sont couronnées, et les Mongols en font l’objet de fréquents pèlerinages. Ces obo nous rappelaient involontairement ces lieux élevés, loca excelsa, dont parle la Bible, et où les Juifs portaient souvent leurs adorations, contre la défense des prophètes.

Il était près de midi quand le terrain, commençant à s’incliner, nous avertit que nous touchions à la fin du plateau. Nous descendîmes par une pente rapide dans une vallée profonde, où nous trouvâmes une petite station mongole.