Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/291

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sous les ongles, de longues aiguilles en bambou. Par ce moyen, comme disent les Chinois, la vérité fut séparée de l'erreur, et la conduite du Nomekhan fut manifestée au grand jour. Ce malheureux avoua lui-même ses crimes, sans qu'il fût besoin de le soumettre à la question : il se reconnut coupable d'avoir arraché trois vies au Talé-Lama, et de l'avoir fait transmigrer violemment ; le première fois, par strangulation ; la deuxième, par suffocation ; et la troisième, par empoisonnement. Un procès-verbal fut dressé en chinois, en tartare et en thibétain. Le Nomekhan et ses complices le signèrent. Le Bandchan-Remboutchi, les quatre Kalons et l'ambassadeur chinois y apposèrent leur sceau, et il fut immédiatement envoyé à Péking, par un courrier extraordinaire. Tout cela se fit à huis-clos et dans le plus grand secret.

Trois mois après, la capitale du Thibet était plongée dans une affreuse agitation ; on voyait placardé au grand portail du palais du Nomekhan, et dans les rues principales de la ville, un édit impérial, en trois langues, sur papier jaune, et avec des bordures représentant des dragons ailés. Après de hautes considérations sur les devoirs des rois et des souverains grands et petits ; après avoir exhorté les potentats, les monarques, les princes, les magistrats et les peuples des quatre mers à marcher dans les sentiers de la justice et de la vertu, sous peine d'encourir la colère du ciel et l'indignation du grand Khan ... ; l'Empereur rappelait les crimes du Nomekhan, et le condamnait à un exil perpétuel sur les bords du Sakhalien-Oula, au fond de la Mantchourie. .... A la fin, était la formule d'usage : Qu'on tremble, et qu'on obéisse ! ! !