Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/33

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pas, lui répondîmes-nous. A ces mots, sa figure s'épanouit de contentement, et il nous déclara que nous ne pourrions pas continuer notre route, à moins de payer une forte somme d'argent. — Comment, un passeport ou de l'argent ! sache que nous avons traversé la Chine d'un bout à l'autre, que nous avons été à Péking, que nous avons parcouru toute la Tartarie sans jamais avoir de passeport, et sans dépenser une seule sapèque. Toi qui es chef des satellites, est-ce que tu ne sais pas encore que les Lamas ont le privilège de voyager partout sans passeport ? — Quelle parole prononcez-vous ? voici une caravane qui vient d'arriver, il y a deux Lamas, et ils m'ont présenté leur passeport comme les autres. — Si ce que tu dis est vrai, il faut en conclure qu'il y a des Lamas qui prennent des passeports, et d'autres qui n'en prennent pas. Nous autres nous sommes de ceux qui n'en prennent pas ... Voyant que la contestation traînait trop en longueur, nous employâmes un argument décisif. — C'est bon, lui dîmes-nous, nous te donnerons tout l'argent que tu demanderas ; mais tu nous écriras un billet que tu signeras, et dans lequel tu diras que, pour nous laisser passer, tu as exigé de nous ou un passeport ou une somme d'argent. Nous nous adresserons au premier Mandarin que nous rencontrerons, et nous lui demanderons si cela est conforme ou non aux lois de l'empire. — L'aubergiste satellite n'insista plus. — Puisque vous avez été à Péking, dit-il, il se peut que l'Empereur vous ait donné des privilèges particuliers ... ; puis il ajouta à voix basse et en souriant : Ne dites pas aux Tartares qui sont ici, que je vous laisse passer gratis. C'est une véritable compassion, que de voir ces pauvres