Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/337

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parlait qu'avec admiration de la prodigieuse capacité des Français. Le Régent nous dit : — Vos chemins de fer et vos navires aériens ne m'étonnent plus tant ; des hommes qui peuvent inventer une machine comme celle-ci, sont capables de tout.

Le premier Kalon était tellement engoué des choses de notre patrie, qu'il lui prit fantaisie d'étudier la langue française. Un soir, nous lui apportâmes, selon ses désirs, un A B C français, dont chaque lettre avait la prononciation écrite, au-dessous, avec des caractères thibétains. Il y jeta un coup d'œil ; et comme nous voulions lui donner quelques explications, il nous répondit que cela n'était pas nécessaire, que ce que nous avions écrit était très-clair.

Le lendemain, aussitôt que nous parûmes en sa présence, il nous demanda quel était le nom de notre empereur. — Notre empereur s'appelle Louis-Philippe. — Louis-Philippe! Louis-Philippe !... C'est bien. — Puis il prit son poinçon, et se mit à écrire. Un instant après, il nous présenta un morceau de papier ; où l'on voyait écrit, en caractères très-bien formés : LOUY FILIPE.

Pendant la courte période de notre prospérité à Lha-Ssa, nous eûmes aussi des relations assez familières avec l'ambassadeur chinois Ki-Chan. Il nous fit appeler deux ou trois fois pour parler politique, ou, selon l'expression chinoise, pour dire des paroles oiseuses. Nous fûmes fort surpris de le trouver si au courant des affaires d'Europe. Il nous parla beaucoup des Anglais et de la reine Victoria. — Il paraît, dit-il, que celle femme a une grande capacité, mais son mari, selon moi, joue un rôle fort ridicule : elle ne le laisse se mêler de rien. Elle lui a fait arranger un jardin