Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/37

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impossible de nous entendre. Aussitôt que nous pûmes faire quelques pas, nous nous dirigeâmes vers une ferme qui n'était pas très-éloignée de nous, mais que nous n'avions pu remarquer auparavant. L'ouragan ayant renversé le grand portail de la cour, il nous fut facile d'entrer. La maison elle-même nous fut bientôt ouverte ; car la Providence nous avait fait rencontrer, au milieu de notre détresse, une famille vraiment remarquable par ses mœurs hospitalières.

Dès notre arrivée, on nous fit chauffer de l'eau pour nous laver. Nous étions dans un état affreux : la poussière nous enveloppait des pieds à la tête ; elle avait même pénétré nos habits, et nos corps en étaient tout imprégnés. Si un pareil temps nous eut assaillis au passage des monts Alechan, nous eussions été enterrés vivants dans les sables, sans qu'on eût pu jamais savoir de nos nouvelles.

Quand nous vîmes que le fort de la tempête était passé, et que le vent ne soufflait plus que par petites rafales, nous songeâmes à nous remettre en route, mais les bons paysans de la ferme ne voulurent jamais consentir à nous laisser partir. Ils nous dirent qu'ils trouveraient moyen de nous loger pendant la nuit, et que nos animaux ne manqueraient ni d'eau, ni de fourrage. Leur invitation nous parut si sincère et si cordiale, nous avions d'ailleurs un si grand besoin de repos, que nous profitâmes volontiers de leur offre. Pour peu qu'on ait des rapports avec les habitants du Kan-Sou, il est facile de voir qu'ils ne sont pas de pure origine chinoise. Parmi eux, c'est l'élément tartaro-thibétain qui domine. Il se manifeste plus particulièrement dans le caractère, les mœurs et le langage des