Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/463

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et son fils allaient en palanquin ; cependant, malgré toutes les commodités de ce moyen de transport, ces deux illustres voyageurs étaient tellement exténués de fatigue et découragés, qu'on doutait généralement qu'ils eussent assez de force et d'énergie pour arriver en Chine. Les Mandarins lettrés étant accoutumés à mener une vie molle et aisée, sont d'ordinaire peu propres à supporter les innombrables misères de la route du Thibet. Parmi ceux qu'on y envoie remplir les divers postes de fournisseurs, il en est peu qui aient le bonheur de revoir leur patrie.

Le jour de notre départ, le vieux Houtouktou de Tsiamdo nous envoya une escorte de quatre cavaliers thibétains, pour protéger notre marche jusque chez le Tchaktchouba de Djaya. En sortant de la ville, nous passâmes sur un magnifique pont entièrement construit avec de grands troncs de sapins, et nous joignîmes la route du Sse-Tchouen, qui serpente sur les flancs d'une haute montagne, au pied de laquelle coule avec rapidité la rivière Dza-Tchou. Après une vingtaine de lis, nous rencontrâmes, à un détour de la montagne, dans une gorge profonde et resserrée, une toute petite troupe de voyageurs qui présentaient un tableau plein de poésie. La marche était ouverte par une femme thibétaine, à califourchon sur un grand âne, et portant un tout jeune enfant solidement attaché sur son dos avec de larges lanières en cuir. Elle traînait après elle, par un long licou, un cheval bâté, et chargé de deux caisses oblongues qui pendaient symétriquement sur ses flancs. Ces deux caisses servaient de logement à deux enfants dont on apercevait les figures rieuses et épanouies, étroitement encadrées dans de petites fenêtres. La différence d'âge de ces enfants