Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/83

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c'est ce que les Chinois appellent laisser la porte fermée.

Les Hoeï-Hoeï ne font pas la fête du nouvel an à la même époque que les Chinois. Dans leur calendrier spécial, ils suivent l'hégire de Mahomet. Cette circonstance nous valut de passer ces jours de désordre et de tumulte dans la plus grande tranquillité. L'époque fixée pour la réclamation des dettes fut seulement signalée par quelques querelles ; mais, après cela, tout rentra dans une paix profonde. La Maison de repos ne fut pas même troublée par des détonations de pétards. Nous profitâmes de ce calme et de l'absence de Sandara, pour revoir toutes nos leçons de thibétain. Les deux dialogues que nous possédions furent analysés, décomposés, soumis en quelque sorte au creuset et à l'alambic, dans toutes leurs parties. Les soins du ménage nous volaient bien un peu de temps ; mais nous nous rattrapions pendant la nuit, ce qui ne faisait pas trop le compte du chef de la maison. S'étant aperçu que nous lui causions une trop grande dépense en fait d'éclairage, il nous enleva la bouteille d'huile, et s'avisa, en véritable Turc qu'il était, de nous taxer journellement notre lumière. Comme nous ne voulions pas être condamnés aux ténèbres avant minuit, nous achetâmes un paquet de chandelles ; nous fabriquâmes ensuite, avec un long clou et une moitié de rave, un chandelier, peu élégant et peu riche si l'on veut, mais qui n'en faisait pas moins admirablement son office. Quand l'huile du Turc était consumée, nous allumions notre chandelle, et nous pouvions de cette façon donner libre cours à notre ardeur pour l'étude du thibétain. Il nous arrivait parfois d'interrompre notre travail, et de nous délasser en causant de la France. Après avoir erré