Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Choses vues, tome II.djvu/175

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M. Valois est venu m’annoncer que le produit des deux lectures des Châtiments était 14 500 francs. En ajoutant 500 francs, on aurait trois canons. Je donne pour commencer ces 500 francs 100 francs.

La Société des gens de lettres désire que, le premier (canon) étant nommé par moi Châteaudun, le deuxième s’appelle Châtiment et le troisième Victor Hugo.

J’y ai consenti.

M. Pierre Véron[1] m’a envoyé le beau dessin de Daumier représentant l’Empire foudroyé par les Châtiments.


16 novembre. — Baroche, dit-on, est mort. — À Caen.

M. Édouard Thierry[2] refuse de laisser jouer le cinquième acte d’Hernani à la Porte-Saint-Martin pour les victimes de Châteaudun et pour le canon du 24e bataillon. — Curieux obstacle que M. Thierry.


17 novembre — Visite du Comité des gens de lettres (MM. J. Claretie, Altaroche, Muller, Germond-Lavigne, Ducuing, Celliez, Em. Gonzalès, Valois, Lapointe, etc.). Le Comité vient me demander d’autoriser une troisième lecture des Châtiments à l’Opéra pour avoir un quatrième canon.


18 novembre. — Je mentionne ici une fois pour toutes que j’autorise qui le veut à dire ou à représenter tout ce qu’on veut de moi, sur n’importe quelle scène, pour les canons, les blessés, les ambulances, les ateliers, les orphelinats, les victimes de la guerre, les pauvres, et que j’abandonne tous mes droits d’auteur sur ces lectures ou ces représentations.

Je décide que la troisième lecture des Châtiments sera donnée gratis pour le peuple à l’Opéra.


19 novembre. — Mme  Marie Laurent est venue me dire les Pauvres gens, qu’elle dira demain à la Porte-Saint-Martin, au profit d’un canon.


20 novembre. — Hier soir, aurore boréale.

La Grosse Joséphine n’est plus ma voisine. On vient de la transporter au bastion 41. Il a fallu vingt-six chevaux pour la traîner. Je la regrette. La nuit, j’entendais sa grosse voix, et il me semblait qu’elle causait avec moi. Je partageais mes amours entre Grosse Joséphine et Petite Jeanne.

  1. Directeur du Charivari, auteur de livres humoristiques et satiriques. (Note de l’éditeur.)
  2. Critique dramatique et littéraire ; bibliothécaire de l’Arsenal ; administrateur de la Comédie-Française (1859-1871). (Note de l’éditeur.)