Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Choses vues, tome II.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Bernard et Nisard ont parlé pour M. Dumas. MM. Legouvé et Mignet, pour M. Jules Simon. Je n’ai rien dit.

En sortant, Alexandre Dumas fils m’a abordé. Je lui ai dit : — Il y a deux Dumas ; l’Académie des sciences en a un, l’Académie française a l’autre. Que chacune garde le sien. Moi, je suis content du nôtre.


13 mai. — Comme je passais sous la porte qui va à la seconde cour de l’Institut, fracas d’une voiture princière. J’y vois quelqu’un qui me salue. C’est le duc d’Aumale. Nous causons. Je lui demande un vote sérieux contre l’empire, représenté par l’ex-sénateur Dumas. Il me dit : — Je ne puis qu’une chose, m’obstiner dans mon vote solitaire et faire manquer l’élection. Cela vous va-t-il ? — Oui, lui dis-je. — C’est convenu. Nous nous serrons la main. Nous entrons.

On scrutine. John Lemoine est nommé pour remplacer Jules Janin.

Quant au fauteuil de Guizot, quatre tours de scrutin sans résultat. Il faut 18 voix. Jules Simon en a 17, Dumas, 17, Laugel, 1[1]. Cette voix unique persiste. C’est le vote du duc d’Aumale. — Renvoi à six mois.


1er juin. — M. de Rémusat, que j’avais vu le 13 mai à l’Académie, et qui était fort gai ce jour-là, est mort. L’autre jour, il entre au Vaudeville, a chaud, sort, a froid, rentre avec la fièvre et il est mort ce matin à sept heures. C’était un esprit probe, fin et fort, sans grandeur.


1er juillet. — Mme  Marie Laurent est venue me dire le Revenant qu’elle dit ce soir à la Gaîté au bénéfice des inondés.

L’état de siège ne veut rien laisser dire de l’Année terrible.


23 septembre. — J’ai écrit ce matin mes dispositions, notamment pour la publication des choses inédites que je laisserai après ma mort. Je désigne pour cette publication, mes fils bien-aimés n’étant plus là, trois amis : Paul Meurice, Auguste Vacquerie et E. Lefèvre.


22 octobre. — M. Ernest Thomas, gendre de ce brave Morin qui fut le premier maître de mes fils, m’a apporté les deux portraits de Charles enfant et de Victor enfant, faits par leur mère, en 1837, et donnés par elle à M. Morin. M. Ernest Thomas m’a offert ces portraits si précieux pour moi. M. Morin est mort.

Charles ressemble à Georges et Victor à Jeanne.

  1. Laugel, secrétaire du duc d’Aumale. (Note de l’éditeur.)