Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome I.djvu/246

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pas[1] : ce sera autant de plus à regagner par mon travail. Peut-être d’ailleurs serons-nous dédommagés par la pension de l’Intérieur. Enfin !…

Faut-il te le dire, mon Adèle bien-aimée ? il est bien temps que je sois heureux. Je commençais à me lasser de ma position équivoque. Je m’effrayais quelquefois en moi-même d’un avenir qui ne m’offrait rien de fixe que ma volonté. Il m’était insupportable de voir le plus grand et le plus noble des bonheurs reculer ainsi devant mes yeux avec cette misérable pension. Il a fallu tout cela pour qu’elle eût quelque prix pour moi. Ce sera vraiment une étrange circonstance de notre vie que d’avoir été si longtemps contraints de mêler des affaires d’argent à des choses du cœur. Enfin, enfin, tout annonce que cette intolérable nécessité va cesser.

Oh ! quel jour heureux que celui où ton Victor n’aura plus à songer qu’au bonheur !

Adieu pour l’instant, chère amie, je vais aller voir où en sont les débats des assises, s’ils pouvaient durer jusqu’à vendredi ! Une journée entière près de toi ! C’est encore une chose singulière de notre position que d’être contraints, pour trouver quelques instants de doux entretiens, de nous réfugier dans la salle d’un tribunal. Personne ne se doute pourquoi je désirerais la prolongation du procès. Adieu donc, mon Adèle chérie, nous nous reverrons à cinq heures. En attendant, je t’embrasse bien tendrement.

Ton Victor.
  1. La pension de 1 200 francs était réduite à 1 000.