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1818.


Au général Hugo.
20 juillet 1818.

La situation où nous nous trouvons semble ne nous laisser le choix qu’entre deux états, la médecine et le droit. Nous aurions songé au premier pour l’un de nous deux, mais la difficulté de se faire connaître dans une carrière épineuse, et surtout la longueur des études (il ne faut pas moins de 7 ans pour être reçu dans cette faculté) nous en ont promptement détournés, par la pensée que nous resterions encore trop longtemps à ta charge.

Le même inconvénient n’existe pas dans le droit. Trois années d’études suffisent, en sorte que si tu avais pu obtempérer à nos désirs quand nous t’en avons parlé pour la première fois il y a deux ans, nous ne serions peut-être plus un fardeau pour toi. Nous avons considéré en outre que la connaissance du droit était indispensable pour être admis aux emplois de l’administration militaire et à la plupart des charges de l’administration civile ; si d’ailleurs nous nous trouvions tous les deux dans le cas d’embrasser la carrière du barreau, ce n’est pas dans une ville comme Paris que deux avocats pourraient se nuire.

Quant aux arrangements relatifs au pensionnat, tu sais bien, mon cher papa, qu’il n’est plus possible que nous restions chez M. Decotte, maintenant que nos études sont finies. Nous te proposons de nous donner 800 francs à chacun pour nos dépenses[1]. Nous voudrions te demander moins, mais tu sentiras que cela nous est impossible, si tu considères que tu nous donnes déjà 500 francs pour notre entretien, et qu’avec 500 francs de plus nous ne pourrons, sans la plus stricte économie, subvenir aux frais de notre nourriture, à l’achat de nos livres, au paiement de nos inscriptions et diplômes, etc[2].

  1. « … Je ne trouve point vos prétentions exagérées… Suivez donc le droit. Je vous ferai compter à chacun et par douzièmes huit cents francs par an. » (Lettre du général Hugo, 6 août 1818.)
  2. Louis Belton. — Victor Hugo et son frère Eugène à la pension Cordier et Décotte et au Collège Louis-le-Graud. — Extrait.