Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome I.djvu/391

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
À Monsieur Z…,
rédacteur au Journal des Débats[1]


[27 juillet 1824.]
Monsieur,

Je vois avec un chagrin véritable que vous m’avez mal compris, pour le fond et pour la forme. Il m’est impossible de me figurer comment vous avez pu voir un ordre d’insertion dans la prière, ce me semble, très polie que contient à cet égard ma réponse à votre article ; et surtout comment vous avez pu trouver une apologie de mes nouvelles Odes dans ce qui n’est qu’une réfutation, peut-être assez mesurée, de votre ingénieux paradoxe sur les classiques et les romantiques.

Vous voulez bien promettre à ces nouvelles Odes l’honneur de les examiner une seconde et dernière fois. Je suis flatté d’être l’objet de tant d’attention de votre part ; mais j’avoue que j’attendais plutôt une réplique à ma réponse qu’un nouvel article sur ces Odes. Je vous abandonne d’avance ces compositions, si vulnérables sous tous les rapports ; mais je crois que lorsque vous aurez très facilement prouvé que mes vers sont mauvais, il vous restera encore à démontrer que votre théorie littéraire sur le classique et le romantique n’est pas erronée ; et c’est là, permettez-moi de vous le dire, monsieur, le véritable point de la question.

Permettez-moi de vous dire encore que je n’adopte point le mot de romantique avant qu’il ait été universellement défini. Mme de Staël lui a donné un fort beau sens et je déclare ne pas lui reconnaître d’autre acception.

Quoi qu’il en soit, je me féliciterai toujours, monsieur, d’avoir fourni au public, fût-ce à mes dépens, l’occasion de lire un nouvel article de vous.

J’ose réclamer encore de votre obligeance l’insertion de cette lettre au Journal des Débats. L’expression d’ordre qui vous est échappée a fait naître

  1. En réponse la lettre de Victor Hugo (publiée au Journal du Débats, juillet 1824, et réimprimée dans Odes et Ballades, Revue de la Critique, édition de l’Imprimerie Nationale), le Journal des Débats inséra, le 26 juillet 1824, cette lettre adressée par M. Z... (Hoffmann) au Rédacteur des Débats :
    « J’ai reçu de M. Victor Hugo l’invitation ou plutôt l’ordre de faire insérer dans votre journal une longue lettre où il prétend venger les romantiques auxquels je n’ai fait aucune injure, et surtout les Nouvelles Odes que je n’ai point maltraitées. Comme cette insertion dépend de vous et du silence de la politique, je vous prie instamment de vouloir bien saisir une occasion opportune pour communiquer au public le factum de M. Victor Hugo en faveur de ses coreligionnaires en Apollon ; j’espère que vous voudrez bien aussi me permettre de vous envoyer un second et dernier article sur les Nouvelles Odes de M. Victor Hugo ; je les examinerai avec moins de timidité aujourd’hui que je ne doute plus de ses opinions littéraires, puisqu’il dit nous en parlant des écrivains romantiques. »