Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome I.djvu/396

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dont il me met à même de profiter. J’abandonne la discussion au point où elle commence à me devenir personnelle, et, du moment où il n’y a plus que moi d’accusé, je me range le premier pour la condamnation.

Aussi les deux observations par lesquelles je vais terminer ne porteront-elles que sur des faits.

M. Z… présente, comme « un échantillon » de romantisme « beaucoup plus étrange que les robes de vapeur et le vêtement de mystère » la strophe suivante :

Sors-tu de quelque tour qu’habite le Vertige,
Nain bizarre et cruel, qui sur les monts voltige,
Prête aux feux des marais leur errante rougeur,
Rit dans l’air, des grands pins courbe en criant les cimes.
Et chaque soir, rôdant sur les bords des abîmes.
Jette aux vautours du gouffre un pâle voyageur.

M. Z… veut que « cet être puissant qui courbe les cimes des grands pins » soit une chauve-souris, parce que la pièce est adressée à la chauve-souris ; il en conclut que le poëte, parlant au vocatif, devrait dire : « Nain cruel, qui voltiges, qui prêtes, qui ris, qui jettes, etc. ». Voilà certainement un étrange échantillon, non seulement de romantisme, mais encore de la profonde ignorance du « poëte ». Mais pourquoi vouloir précisément me faire dire ce que je n’ai pas dit ? Le Vertige est ici le nominatif de la phrase, et c’est lui qui voltige, qui rit, qui jette, etc. ; et non la chauve-souris. — C’est là, dira M. Z..., une personnification du Vertige bien romantique ! — Soit ; mais est-elle beaucoup plus singulière que les personnifications classiques du Zéphyr et de l’Écho ? En attendant qu’on décide la chose, je prie M. Z… de croire qu’il n’y a point d’incompatibilité absolue entre les écrivains qu’il nomme romantiques et l’orthographe.

Après m’avoir plus d’une fois fait sentir qu’il s’est plu jusqu’ici à couvrir d’un voile les taches les plus considérables de mes odes, après avoir dit qu’il a cité le moins défectueux de ce qui lui a paru condamnable, M. Z…, poussé à bout, termine par la citation d’une strophe qu’il ne paraît même transcrire qu’à regret, c’est celle sur le cauchemar :

Un monstre aux éléments prend vingt formes nouvelles,
Tantôt dans une eau morte il traîne son corps bleu,
Tantôt son rire éclate en rouges étincelles ;

Deux éclairs sont ses yeux, deux flammes sont ses ailes.
Il vole sur un lac de feu.

« Dira-t-on maintenant, ajoute M. Z…, que j’aie choisi, comme l’a pensé M. Victor Hugo, les défauts les plus saillants de ses odes ? N’avais-je pas