Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome I.djvu/567

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contente, cela suffit à tes parents, ma fille ; nous te sentons heureuse, nous sommes heureux.

Il ne faut pas t’étonner si ta bonne mère ne t’a pas écrit. Elle est bien occupée, tu le sais. Elle a toute la maison à tenir, et elle passe tous les jours quatre heures à faire travailler ce pauvre ange de Dédé.

Remercie bien en notre nom l’excellente Mme  Chaley et toute sa famille pour les bontés dont tu as été comblée. Moi je te remercie d’avoir copié ces vers. J’ai pris quelques heures aux promenades, aux jeux, aux causeries sous les arbres ; mais puisque cela ne t’a pas ennuyée, je suis content. Cela t’a fait penser à ton père qui n’a besoin de rien pour penser à toi.

À jeudi, ma Didine bien-aimée. Tu vas nous revenir, et cette idée remplit la maison de joie. À jeudi, mon ange.

Ton bon père.
V.[1]


À Auguste Vacquerie.


23 juillet [1839].

Vous m’envoyez des vers charmants, et vos reproches sont des caresses. Je voudrais, moi, vous remercier en vers, et c’est tout au plus si je puis vous remercier en prose. Figurez-vous que je suis dans ces jours décisifs où l’on tourne autour d’une œuvre qu’on a dans l’esprit afin de trouver le meilleur côté pour l’entamer. Vous avez vu l’an dernier combien j’étais absorbé au moment de commencer Ruy Blas. Il y a une sorte de tristesse sombre et mêlée de crainte qui précède l’abordage d’une grande idée. Vous savez cela, n’est-ce pas ? Je suis dans un de ces instants-là. Seulement, l’idée est-elle grande ? Je le crois. Vous en jugerez un jour.

Ma famille sera bien heureuse en vacances, grâce à vous, mon cher poëte[2]. Je voudrais bien en être. Mais j’ai un tas de cathédrales à voir pour nos travaux du comité[3], et j’aurai à peine six semaines à moi. Vous me regretterez un peu, n’est-il pas vrai ?

Adieu, je suis à vous de toute âme.

Victor H.

Remerciez bien pour moi et les miens votre aimable et excellente famille[4].

  1. Archives de la famille de Victor Hugo.
  2. Mme  Victor Hugo et ses enfants passèrent l’été de 1839 à Villequier chez la mère d’Auguste et Charles Vacquerie.
  3. Comité historique des Arts et Monuments.
  4. Les Jumeaux. Historique. Édition de l’Imprimerie Nationale.