Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Correspondance, tome I.djvu/569

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le sens bien profondément en ce moment où je suis seul lisant tes chères petites lettres avec les larmes aux yeux.

Dans une quinzaine de jours, du 15 au 20, je vous reverrai, je vous embrasserai, nous en aurons pour longtemps à être ensemble et je serai bien heureux.

Vois-tu, chère fille, on s’en va, parce qu’on a besoin de distraction, et l’on revient, parce qu’on a besoin de bonheur.

Continue d’être bonne et douce et de faire ma joie. Sois attentive et tendre avec ton excellente mère. Elle vous aime tant et elle est si digne d’être aimée.

Toutes les nuits je regarde les étoiles comme nous faisions le soir sur le balcon de la place Royale, et je pense à toi, ma Didine. Je vois avec plaisir que tu aimes et que tu comprends la nature. La nature, c’est le visage du bon Dieu. Il nous regarde par là, et c’est là que nous pouvons lire sa pensée.

Au moment où cette lettre te parviendra, vous serez sur le point de partir pour Paris. Peut-être même serez-vous déjà partis. Moi aussi, dans quelques jours, je vais commencer mon mouvement de retour. Je laisserai derrière moi le beau temps et le beau soleil, mais devant moi je t’aurai, ma Didine bien-aimée, je vous aurai tous. Toute ma vie est dans vous. Je t’embrasse, chère enfant.

Ton bon petit père,
V.

Écris-moi tout de suite à Chalon-sur-Saône, poste restante[1].


À Auguste Vacquerie[2].


Marseille, 3 octobre [1839].

Je ne lis qu’aujourd’hui, cher poëte, votre charmante et douce apostille à la lettre de mon Charlot. Votre message a voyagé à ma suite de Cologne à Marseille et ne fait que d’arriver. J’ai vu en effet de belles choses et dont vous auriez tiré une ravissante poésie. Moi, je n’ai fait que passer, pensant à ceux que j’aime.

Vous êtes parmi ceux-là au premier rang, vous le savez bien, n’est-ce pas ? Vous avez eu pendant un grand mois autour de vous tout ce qui remplit mon cœur. Je vous enviais et je les enviais.

  1. Archives de la famille de Victor Hugo.
  2. Inédite.