Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Philosophie, tome II.djvu/645

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nom d’hypothèse est un commencement d’acceptation que la science ne consent même pas à lui donner, tant cette loi est encore engagée dans la chimère. Existe-t-elle ? question. Les plus hardis se bornent à dire : il y a quelque chose là.)

Nous fermons la parenthèse, nous ne voulons pas que notre raisonnement perde pied un seul instant, et nous déclarons nous en tenir aux faits perceptibles à tous ; nous raisonnons sur le palpable et le visible ; nous restons dans les données de l’expérimentation philosophique universellement admise. Cela posé, qu’est-ce que l’homme sur la terre a de plus que les autres êtres ? La faculté de faire le bien ou le mal.

À lui commence cette faculté, et, par conséquent, cette notion : le bien et le mal.

Le bien et le mal, quelle ouverture sur l’inconnu !

Révélation de la loi morale.

Pouvoir faire le bien ou le mal, qu’est-ce ? C’est la liberté. Et qu’est-ce encore ? C’est la responsabilité. Liberté ici, responsabilité ailleurs, ô découverte splendide ! La liberté, c’est l’âme.

Liberté implique résurrection ; car résurrection, c’est responsabilité. Pour accomplir sa loi, c’est-à-dire pour devenir de liberté responsabilité, il faut absolument qu’après la vie ce phénomène, qui est l’homme même, persiste. Donc, et irrésistiblement, voilà la survivance de l’âme au corps . démontrée.

Ce sont là les ténèbres sacrées.

La loi morale est le fil trouvé dans le labyrinthe. Je sens de la chaleur, j’avance, c’est le bien ; je sens du froid, je recule, c’est le mal. L’affinité de Dieu avec mon âme se manifeste par une ineffable caresse obscure quand je m’approche de lui. Je pense, je le sens près de moi ; je crée, je le sens plus près ; j’aime, je le sens plus près ; je me dévoue, je le sens plus près encore. Ceci n’est ni de l’observation, car je ne vois ni ne touche rien ; ni de l’imagination, car la vertu serait imaginaire alors ; c’est de l’intuition.

Toutes les racines de la loi morale sont dans ce qu’on appelle le surnaturalisme. Nier le surnaturalisme, ce n’est pas seulement fermer les yeux à l’infini, c’est couper les vertus de l’homme par le pied. L’héroïsme est une affirmation religieuse. Quiconque se dévoue prouve l’éternité. Aucune chose finie n’a en elle l’explication du sacrifice.

Celui qui écrit ces lignes l’a déjà dit quelque part, l’idéal sur la terre, l’infini hors de la terre, c’est là le double but qui est en même temps le but unique, car l’un mène l’homme au progrès et l’autre mène l’âme à Dieu.

On peut, à coup sûr, être un esprit ironique et tranquille, ne croire à rien, et quitter cette vie d’une façon fière. Pétrone, homme de plaisir, fait tout ce