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LA FÉE ET LA PÉRI.

Avec ses flèches d’or, ses kiosques brillants,
Est comme un bataillon, arrêté dans les plaines,
Qui, parmi ses tentes hautaines,
Élève une forêt de dards étincelants.

On dirait qu’au désert, Thèbes, debout encore,
Attend son peuple entier, absent depuis l’aurore.
Madras a deux cités dans ses larges contours.
Plus loin brille Delhy, la ville sans rivales,
Et sous ses portes triomphales
Douze éléphants de front passent avec leurs tours.

Bel enfant ! viens errer, parmi tant de merveilles,
Sur ces toits pleins de fleurs ainsi que des corbeilles,
Dans le camp vagabond des arabes ligués.
Viens ; nous verrons danser les jeunes bayadères,
Le soir, lorsque les dromadaires
Près du puits du désert s’arrêtent fatigués.

Là, sous de verts figuiers, sous d’épais sycomores,
Luit le dôme d’étain du minaret des maures ;
La pagode de nacre au toit rose et changeant ;
La tour de porcelaine aux clochettes dorées ;
Et, dans les jonques azurées,
Le palanquin de pourpre aux longs rideaux d’argent.

J’écarterai pour toi les rameaux du platane
Qui voile dans son bain la rêveuse sultane ;
Viens, nous rassurerons contre un ingrat oubli
La vierge qui, timide, ouvrant la nuit sa porte,
Écoute si le vent lui porte
La voix qu’elle préfère au chant du bengali.

L’Orient fut jadis le paradis du monde.
Un printemps éternel de ses roses l’inonde,
Et ce vaste hémisphère est un riant jardin.
Toujours autour de nous sourit la douce joie ;