Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/113

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Cent nuages ardents luisent sous son flanc noir
Comme des écailles dorées.

Puis se dresse un palais ; puis l’air tremble, et tout fuit.
L’édifice effrayant des nuages détruit
S’écroule en ruines pressées ;
Il jonche au loin le ciel, et ses cônes vermeils
Pendent, la pointe en bas, sur nos têtes, pareils
À des montagnes renversées.

Ces nuages de plomb, d’or, de cuivre, de fer,
Où l’ouragan, la trombe, et la foudre, et l’enfer
Dorment avec de sourds murmures,
C’est Dieu qui les suspend en foule aux cieux profonds,
Comme un guerrier qui pend aux poutres des plafonds
Ses retentissantes armures.

Tout s’en va ! Le soleil, d’en haut précipité,
Comme un globe d’airain qui, rouge, est rejeté
Dans les fournaises remuées,
En tombant sur leurs flots que son choc désunit
Fait en flocons de feu jaillir jusqu’au zénith
L’ardente écume des nuées.

Oh ! contemplez le ciel ! et dès qu’a fui le jour,
En tout temps, en tout lieu, d’un ineffable amour,
Regardez à travers ses voiles ;
Un mystère est au fond de leur grave beauté,
L’hiver, quand ils sont noirs comme un linceul, l’été,
Quand la nuit les brode d’étoiles.


Novembre 1828.