Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/123

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Lorsque pour moi vers Dieu ta voix s’est envolée,
Je suis comme l’esclave, assis dans la vallée,
Qui dépose sa charge aux bornes du chemin ;
Je me sens plus léger ; car ce fardeau de peine,
De fautes et d’erreurs qu’en gémissant je traîne,
Ta prière en chantant l’emporte dans sa main.

Va prier pour ton père ! — Afin que je sois digne
De voir passer en rêve un ange au vol de cygne,
Pour que mon âme brûle avec les encensoirs !
Efface mes péchés sous ton souffle candide,
Afin que mon cœur soit innocent et splendide
Comme un pavé d’autel qu’on lave tous les soirs !


III


Prie encor pour tous ceux qui passent
Sur cette terre des vivants !
Pour ceux dont les sentiers s’effacent
À tous les flots, à tous les vents !
Pour l’insensé qui met sa joie
Dans l’éclat d’un manteau de soie,
Dans la vitesse d’un cheval !
Pour quiconque souffre et travaille,
Qu’il s’en revienne ou qu’il s’en aille,
Qu’il fasse le bien ou le mal !

Pour celui que le plaisir souille
D’embrassements jusqu’au matin,
Qui prend l’heure où l’on s’agenouille
Pour sa danse et pour son festin,
Qui fait hurler l’orgie infâme
Au même instant du soir où l’âme