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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/486

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Sortir de ce tas d’ombre amassé par l’envie
Ton front majestueux !

En attendant, regarde en pitié cette foule
Qui méconnaît tes chants,
Et qui de toutes parts se répand et s’écoule
Dans les mauvais penchant.

Laisse en ce noir chaos qu’aucun rayon n’éclaire
Ramper les ignorants ;
L’orgueilleux dont la voix grossit dans la colère
Comme l’eau des torrents ;

La beauté sans amour dont les pats nous entraîne,
Femme aux yeux exercés
Dont la robe flottante est un piège ou se prennent
Les pieds insensés ;

Les rhéteurs qui de bruit emplissent leur parole
Quand nous les écoutons ;
Et ces hommes sans foi, sans culte, sans boussole,
Qui vivent à tâtons ;

Et les flatteurs courbés, aux douceurs familières,
Aux fronts bas et rampants ;
Et les ambitieux qui sont comme des lierres
L’un sur l’autre grimpants !

Non, tu ne portes pas, ami, la même chaîne
Que ces hommes d’un jour.
Ils sont vils, et toi grand. Leur joug est fait de haine,
Le tien est fait d’amour !

Tu n’as rien de commun avec le monde infime
Au souffle empoisonneur ;
Car c’est pour tous les yeux un spectacle sublime
Quand la main du Seigneur