Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome VI.djvu/232

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Et, n’attendant plus de secours,
Repoussant la guerre civile,
Avant de sortir de sa ville,
Triste, il la contempla trois jours.

Sa tête enfin était courbée.
Plus de triomphes ! plus de cris !
Sa popularité tombée
Couvrait sa gloire de débris.
Partout l’abandon ou la haine !
Le soir, quelque passant à peine,
S’arrêtant, mais sans approcher,
Dans le palais cherchant le maître,
A travers la haute fenêtre
Regardait son ombre marcher
 
Durant ces heures solennelles,
Tandis qu’il sondait son malheur,
L’œil des muettes sentinelles
L’interrogeait avec douleur.
Soldats toujours prêts pour la lutte,
Hélas ! ils comptaient de sa chute
Chaque symptôme avant-coureur ;
Et, comme un jour qui se retire,
Ils voyaient s’effacer l’empire
Dans le regard de l’empereur !

Adieu ses légions sans nombre !
Adieu ses camps victorieux !
II se sentait poussé vers l’ombre
Par un souffle mystérieux.
La nuit, sa fièvre était sans trêves ;
II voyait flotter dans ses rêves
Le spectre d’un rocher lointain ;
Déjà, l’âme d’angoisses pleine,
II entrevoyait Sainte-Hélène
Dans les brumes de son destin.