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par la poste : « Lyon, 3 avril 68 ». Si on ne savait pas que Victor Hugo conservait tous les papiers pouvant être utilisés : enveloppes, lettres, couvertures de livres, bandes de journaux ; qu’il prenait, pour y écrire ses notes ou ses vers, le premier papier qui lui tombait sous la main, on risquerait d’être induit en erreur par cette date et d’être amené à tirer des conclusions différentes ; mais, qu’on le remarque bien, la note porte : IILe Drame : l’Amour, Gallus. Or, en 1868, les Deux trouvailles de Gallus n’étaient pas nées ; tout au plus la première avait-elle été projetée en 1865, mais l’idée de la seconde ne s’était présentée à Victor Hugo qu’en 1869 ; dans cette même année elles entrèrent dans le Théâtre en liberté et c’est seulement en 1870 qu’elles figurèrent dans le livre dramatique des Quatre vents de l’Esprit. En effet, sur une chemise d’un dossier daté du 12 août 1870, Victor Hugo écrit : « Les Deux trouvailles de Gallus forment le livre dramatique des Quatre vents de l’Esprit ». Donc la note de mai 1870 sur Toute l’âme et la note sur la division des Quatre vents de l’Esprit sont contemporaines.

Victor Hugo était un prodigue de variantes. La richesse de son vocabulaire lui permettait ces somptueuses dépenses aussi bien dans ses titres que dans ses vers. Il soumettait à son choix diverses propositions entre lesquelles il hésitait, car sur une grande feuille, au-dessous du titre définitivement adopté, n’offrant qu’une interversion des livres, lyrique et satirique, nous lisons cet autre titre et ces autres divisions :

LE QUADRIGE
DE
L’ESPRIT.

I. L’ode.
La vie.
II. Le drame.
L’amour.
III. La satire.
Le siècle.
IV. L’épopée.
La Révolution.

Et tout au bas de la feuille cette autre proposition, entourée d’un trait :

LE QUADRIGE DU SONGEUR.
LE QUADRIGE DE L’ESPRIT.

Les mots « de l’Esprit » ont été biffés ; et enfin cette indication :

L’esprit a ses points cardinaux.

Cependant, le 21 mai 1870, Victor Hugo avait opté pour une classification, car on lit dans ses carnets :

22 mai. J’ai classé hier le livre satirique ; je vais classer aujourd’hui le livre lyrique.

Ce classement n’était que provisoire, puisque sur une double feuille formant chemise on relève cette mention :

Pour le livre lyrique, pièces a ajouter et à classer. 10 août 1870.

On est amené à conclure de ces documents qu’en mai les livres des Quatre vents de l’Esprit faisaient partie d’une sorte de répertoire général : Toute l’âme ; que, tout en étant compris dans ce recueil, avec le titre des Quatre vents de l’Esprit, ils prenaient une forme plus nettement définie en se rangeant sous les quatre divisions : satire, drame, ode, épopée ou livre satirique, livre dramatique, livre lyrique, livre épique ; qu’enfin, en août 1870, les Quatre vents de l’Esprit n’étaient plus immatriculés dans Toute l’âme. Ils étaient détachés du grand répertoire de poésie, ils avaient leurs parchemins, leur état civil indépendant. Et ce qui le prouve, c’est un inventaire des manuscrits dressé le 15 août au moment où Victor Hugo se préparait à partir pour Bruxelles, à l’époque des tragiques événements de la guerre. Dans cet inventaire, il inscrivait les Quatre vents de l’Esprit comme une œuvre achevée et distincte : par suite de cette