« Ô Maria ! tu ressembles au beau palmier, svelte et doucement balancé sur sa tige, et tu te mires dans l’œil de ton jeune amant, comme le palmier dans l’eau transparente de la fontaine.
« Mais, ne le sais-tu pas ? il y a quelquefois au fond du désert un ouragan jaloux du bonheur de la fontaine aimée ; il accourt, et l’air et le sable se mêlent sous le vol de ses lourdes ailes ; il enveloppe l’arbre et la source d’un tourbillon de feu ; et la fontaine se dessèche, et le palmier sent se crisper sous l’haleine de mort le cercle vert de ses feuilles, qui avait la majesté d’une couronne et la grâce d’une chevelure.
« Tremble, ô blanche fille d’Hispaniola[1] ! tremble que tout ne soit bientôt plus autour de toi qu’un ouragan et qu’un désert ! Alors tu regretteras l’amour qui eût pu te conduire vers moi, comme le joyeux katha, l’oiseau de salut, guide à travers les sables d’Afrique le voyageur à la citerne.
« Et pourquoi repousserais-tu mon amour, Maria ? Je suis roi, et mon front s’élève au-dessus de tous les fronts humains. Tu es blanche, et je suis noir ; mais le jour a besoin de s’unir à la nuit pour enfanter l’aurore et le couchant, qui sont plus beaux que lui ! »
- ↑ Nos lecteurs n’ignorent pas sans doute que c’est le premier nom donné à Saint-Domingue, par Christophe Colomb, à l’époque de la découverte, en décembre 1492.