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de fer, solidement scellée à hauteur d’appui, servait de garde-fou aux tribunes hautes, et garantissait les spectateurs contre la pression des cohues montant les escaliers. Une fois pourtant, un homme fut précipité dans l’assemblée, il tomba un peu sur Massieu, évêque de Beauvais, ne se tua pas, et dit : Tiens ! c’est donc bon à quelque chose, un évêque !

La salle de la Convention pouvait contenir deux mille personnes, et, les jours d’insurrection, trois mille.

La Convention avait deux séances, une du jour, une du soir.

Le dossier du président était rond, à clous dorés. Sa table était contrebutée par quatre monstres ailés à un seul pied, qu’on eût dit sortis de l’apocalypse pour assister à la révolution. Ils semblaient avoir été dételés du char d’Ézéchiel pour venir traîner le tombereau de Sanson.

Sur la table du président il y avait une grosse sonnette, presque une cloche, un large encrier de cuivre, et un in-folio relié en parchemin qui était le livre des procès-verbaux.

Des têtes coupées, portées au bout d’une pique, se sont égouttées sur cette table.

On montait à la tribune par un degré de neuf marches. Ces marches étaient hautes, roides, et assez difficiles ; elles firent un jour trébucher Gensonné qui les gravissait. C’est un escalier d’échafaud ! dit-il. ― Fais ton apprentissage, lui cria Carrier.

Là où le mur avait paru trop nu, dans les angles de la salle, l’architecte avait appliqué pour ornements des faisceaux, la hache en dehors.

À droite et à gauche de la tribune, des socles portaient deux candélabres de douze pieds de haut, ayant à leur sommet quatre paires de quinquets. Il y avait dans chaque loge publique un candélabre pareil. Sur les socles de ces candélabres étaient sculptés des ronds que le peuple appelait « colliers de guillotine ».

Les bancs de l’Assemblée montaient presque jusqu’à la corniche des tribunes ; les représentants et le peuple pouvaient dialoguer.

Les vomitoires des tribunes se dégorgeaient dans un labyrinthe de corridors, plein parfois d’un bruit farouche.

La Convention encombrait le palais et refluait jusque dans les hôtels voisins, l’hôtel de Longueville, l’hôtel de Coigny. C’est à l’hôtel de Coigny qu’après le 10 août, si l’on en croit une lettre de lord Bradford, on transporta le mobilier royal. Il fallut deux mois pour vider les Tuileries.

Les comités étaient logés aux environs de la salle ; au pavillon-Égalité, la législation, l’agriculture et le commerce ; au pavillon-Liberté, la marine, les colonies, les finances, les assignats, le salut public ; au pavillon-Unité, la guerre.