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NOTES DE L’ÉDITEUR.




I

HISTORIQUE DES MISÉRABLES.


Nous avons retracé, dans l’historique du volume précédent, les diverses phases de la fabrication du livre et suivi attentivement la marche de la publication. Nous pensions avoir épuisé le sujet en donnant plusieurs lettres de Victor Hugo et la plupart des lettres d’Albert Lacroix, mais, au moment où nous nous préparions à remettre à l’Imprimerie nationale la copie de ce dernier historique, une vente importante avait lieu, le 18 février 1909, à l’hôtel de la rue Drouot, et nous mettait en possession des lettres de Victor Hugo à Albert Lacroix sur les Misérables.


les lettres de victor hugo.


Cette précieuse et volumineuse correspondance de plus d’une année laisse intact notre récit ; elle nous force nécessairement à revenir — oh ! très brièvement — sur la conversation engagée entre Victor Hugo et Albert Lacroix dans notre précédente notice. Car, en réalité, ces documents inédits qui couronnent l’historique des Misérables apportent un élément entièrement nouveau ; en dehors de l’attrait puissant qu’offrent des lettres de Victor Hugo, nous v voyons la vie du poète se dérouler heure par heure devant nos et ce chapitre que nous ajoutons ici malgré ses liens de parenté avec l’historique précédent nous donne de nouveaux renseignements sur l’œuvre des Misérables et sur sa publication.

Victor Hugo est retiré à Guernesey ; il a voulu passer ces longs mois seul dans son île, il n’a plus ses amis autour de lui ; il a besoin de tout son temps et de tout son recueillement. Ce sont les conditions nécessaires pour qu’il puisse mener à bonne fin cette tâche immense. S’il a tiré de sa malle aux manuscrits ses Misérables écrits de 1846 à 1848, ce n’est pas seulement pour les réviser, c’est pour les compléter : combien de volumes donnera-t-il ? six, huit, neuf ou dix ? Il l’ignore encore.

Il travaille de 6 heures du matin à 11 heures ; deux heures de halte pour le déjeuner et la réflexion, et il reprend de 1 heure de l’après-midi à 6 heures ; puis il abandonne le manuscrit, et il corrige les épreuves de 8 heures du soir à minuit, parfois même jusqu’à 2 heures du matin. Il va porter le paquet lui-même à la poste pour gagner du temps. Quatorze et même seize heures de travail par jour ! qu’importe. Il subit un entraînement, presque sans s’apercevoir de la fatigue. Tout au plus s’en plaint-il une ou deux fois, lorsqu’il veut faire sentir à ses éditeurs qu’ils pourraient surveiller plus attentivement les corrections et lui épargner une besogne inutile.