Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome I.djvu/288

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THURLOË, à Cromwell.
C’est du poison qu’il a bu ?

LORD ROCHESTER, bâillant.
Sur ma foi,
Ce qu’il dit est flatteur pour Cromwell et pour moi !
CROMWELL, bas à Thurloë.
Nous verrons.
THURLOË, à part, regardant Rochester.
Pauvre homme !

LORD ROCHESTER, bâillant.
Ah !… j’ai la tête étourdie.
Bâillant encore.
Quand tout le jour on a joué la comédie,

Jeûné, — prié, — beaucoup prêché, juré fort peu, —
Porté masque de saint, pris même un nom hébreu, —
Du vieux Noll, — sur la bible, — essuyé l’apostrophe… —

C’est dur...
Il bâille.
De s’endormir, juste, à la catastrophe ! —
Il bâille encore.
Puissé-je encor ne pas me réveiller pendu !

Avec moi seulement Ormond sera perdu ; —

C’est là tout mon regret. — Chassons ce triste rêve. —
Il bâille.
Fiole d’enfer ! — ma tête à peine se soulève.
Bonsoir, monsieur Cromwell. — Que Dieu sauve le roi !
Sa tête retombe sur son épaule et il s’endort.

CROMWELL, l’œil fixé sur Rochester endormi.
Quel dévoûment ! — Qui donc ferait cela pour moi ?
À Thurloë.
Portons-le sur ce lit.
Tous deux portent Rochester sur le lit placé dans un coin du théâtre, et l’y déposent sans qu’il se réveille. — En ce moment, on entend frapper à une porte basse donnant sur un des couloirs latéraux de la chambre peinte.