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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome III.djvu/526

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Barberousse, incliné sur ce lit funéraire,
Jura de ne se point révéler à son frère,
Et de ne s'en venger, s'il était encor temps,
Que le jour où ce frère atteindrait ses cent ans.
— C'est-à-dire jamais; quoique Dieu soit le maître ! —
Si bien que le bâtard sera mort sans connaître
Que son père était duc et son frère empereur.
Sfrondati pâlissait d'épouvante et d'horreur
Quand on voulait sonder ce secret de famille.
Les deux frères aimaient tous deux la même fille;
L'aîné se crut trahi, tua l'autre, et vendît
La fille à je ne sais quel horrible bandit.
Qui, la liant au joug sans pitié, comme un homme,
L'attelait aux bateaux qui vont d'Ostie à Rome.
Quel destin ! — Sfrondati disait : C'est oublié !
Du reste, en son esprit tout s'était délié.
Rien ne surnageait plus dans la nuit de son âme ;
Ni le nom du bâtard, ni le nom de la femme.
Il ne savait comment. Il ne pouvait dire où. —
J'ai vu cet homme à Prague enfermé comme fou.
Il est mort maintenant.

Hermann.
Tu conclus?


Teudon.
Je raisonne.
Si tous ces faits sont vrais, la prophétie est bonne.
Car enfin, — cet espoir n'a rien de hasardeux, —
Accomplie une fois, elle peut l'être deux.
Barberousse, déjà cru mort dans sa jeunesse,
Pourrait renaître encor.

Hermann, riant.
Bon! attends qu'il renaisse!

Kunz, à Teudon.
On m'a jadis conté ce conte. En ce château
Frédéric Barberousse avait nom Donato.
Le bâtard s'appelait Fosco. Quant à la belle,
Elle était Corse, autant que je me le rappelle.
Les amants se cachaient dans-un caveau discret,
Dont l'entrée inconnue était leur doux secret;
C'est là qu'un soir Fosco, cœur jaloux, main hardie,
Les surprit, et finit l'idylle en tragédie.

Gondicarius.