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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Théâtre, tome V.djvu/47

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LA GRAND’MÈRE.

LA MARGRAVE.

Oh ! les barreaux de fer, les cloîtres, les cagoules,
J’abhorre tout cela, mais j’ai tant de courroux
Que j’irais leur tirer moi-même les verrous !

CÉCILE, jetant les fleurs et vidant son tablier à terre.

Écoute, amusons-nous.

Empressement du petit Charles.

Écoute, amusons-nous. Nous jouons à la dame
Qui reçoit un monsieur.

LA MARGRAVE, cachée derrière la haie.

Qui reçoit un monsieur. J’ai la rage dans l’âme.

Elle regarde les enfants, et peu à peu les écoute. —
Pendant qu’ils parlent, sans la voir, elle se rapproche d’eux pas à pas.
CÉCILE.

Vois-tu bien, tu seras la dame.

CHARLES.

Vois-tu bien, tu seras la dame. Je ne puis
Être la dame, moi.

CÉCILE.

Être la dame, moi. Pourquoi ?

CHARLES.

Être la dame, moi. Pourquoi ? Puisque je suis
Un garçon.

CÉCILE.

Un garçon. C’est égal. — Je te dirai Madame.

CHARLES.

Mais, pour être une dame, il faut être une femme.
Je suis un homme, moi.

CÉCILE.

Je suis un homme, moi. Mais, qu’on te dit, cela
Ne fait rien. Tu seras la dame. Tiens-toi là.