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AVANT L’EXIL. — CHAMBRE DES PAIRS.

qui s’est fait admirer à la fois, non seulement des populations qui vivent dans l’église romaine, mais de l’Angleterre non catholique, mais de la Turquie non chrétienne, qui a fait faire, enfin, en un jour, pourrait-on dire, un pas à la civilisation humaine. Et cela comment ? De la façon la plus calme, la plus simple et la plus grande, en communiant publiquement, lui pape, avec les idées des peuples, avec les idées d’émancipation et de fraternité. Contrat auguste ; utile et admirable alliance de l’autorité et de la liberté, de l’autorité sans laquelle il n’y a pas de société, de la liberté sans laquelle il n’y a pas de nation. (Mouvement.)

Messieurs les pairs, ceci est digne de vos méditations. Approfondissez cette grande chose.

Cet homme qui tient dans ses mains les clefs de la pensée de tant d’hommes, il pouvait fermer les intelligences, il les a ouvertes. Il a posé l’idée d’émancipation et de liberté sur le plus haut sommet où l’homme puisse poser une lumière. Ces principes éternels que rien n’a pu souiller et que rien ne pourra détruire, qui ont fait notre révolution et lui ont survécu, ces principes de droit, d’égalité, de devoir réciproque, qui, il y a cinquante ans, étaient un moment apparus au monde, toujours grands sans doute, mais farouches, formidables et terribles sous le bonnet rouge, Pie IX les a transfigurés, il vient de les montrer à l’univers rayonnants de mansuétude, doux et vénérables sous la tiare. C’est que c’est là leur véritable couronne en effet ! Pie IX enseigne la route bonne et sûre aux rois, aux peuples, aux hommes d’état, aux philosophes, à tous. Grâces lui soient rendues ! Il s’est fait l’auxiliaire évangélique, l’auxiliaire suprême et souverain, de ces hautes vérités sociales que le continent, à notre grand et sérieux honneur, appelle les idées françaises. Lui, le maître des consciences, il s’est fait le serviteur de la raison. Il est venu, révolutionnaire rassurant, faire voir aux nations, à la fois éblouies et effrayées par les événements tragiques, les conquêtes, les prodiges militaires et les guerres de géants qui ont rempli la fin du dernier siècle et le commencement de celui-ci, il est venu, dis-je, faire voir aux nations que, pour féconder le sillon où germe l’avenir des peuples libres, il n’est pas nécessaire de verser le sang, il suffit de répandre