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Page:Hugo - Actes et paroles - volume 1.djvu/187

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L’ÉTAT DE SIÉGE ET LA LIBERTÉ.

intérêts du pays élèvent la voix pour réclamer ou pour se plaindre, la presse est bâillonnée. (Agitation.)

Messieurs, je dis que la liberté de la presse importe à la bonne discussion de votre constitution. Je vais plus loin (Écoutez ! écoutez !), je dis que la liberté de la presse importe à la liberté même de l’assemblée. (Très bien !) C’est là une vérité… (Interruption.)

Le président. — Écoutez, messieurs, la question est des plus graves.

M. Victor Hugo. — Il me semble que, lorsque je cherche à démontrer à l’assemblée que sa liberté, que sa dignité même sont intéressées à la plénitude de la liberté de la presse, les interrupteurs pourraient faire silence. (Très bien !)

Je dis que la liberté de la presse importe à la liberté de cette assemblée, et je vous demande la permission d’affirmer cette vérité comme on affirme une vérité politique, en la généralisant.

Messieurs, la liberté de la presse est la garantie de la liberté des assemblées. (Oui ! oui !)

Les minorités trouvent dans la presse libre l’appui qui leur est souvent refusé dans les délibérations intérieures. Pour prouver ce que j’avance, les raisonnements abondent, les faits abondent également. (Bruit.)

Voix à gauche. — Attendez le silence ! C’est un parti pris !

M. Victor Hugo. — Je dis que les minorités trouvent dans la presse libre… — et, messieurs, permettez-moi de vous rappeler que toute majorité peut devenir minorité, ainsi respectons les minorités (vive adhésion) ; les minorités trouvent dans la presse libre l’appui qui leur manque souvent dans les délibérations intérieures. Et voulez-vous un fait ? Je vais vous en citer un qui est certainement dans la mémoire de beaucoup d’entre vous.

Sous la restauration, un jour, un orateur énergique de la gauche, Casimir Perier, osa jeter à la chambre des députés cette parole hardie : Nous sommes six dans cette enceinte et trente millions au dehors. (Mouvement.)

Messieurs, ces paroles mémorables, ces paroles qui contenaient l’avenir, furent couvertes, au moment où l’orateur les prononça, par les murmures de la chambre entière, et