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Page:Hugo - Actes et paroles - volume 1.djvu/230

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NOTES. — ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

droit n’est plus en toi, mais en nous. Tu te révoltes contre toi-même ; car nous, c’est toi. Tu es souverain, mais tu es factieux. Ah ! tu veux refaire une révolution ? tu veux courir de nouveau les chances anarchiques et monarchiques ? Eh bien ! puisque tu es à la fois le plus fort et le plus aveugle, rouvre le gouffre, si tu l’oses, nous y tomberons, mais tu y tomberas après nous.

Voilà ce que vous eussiez dit, et vous ne vous fussiez pas séparés.

Oui, messieurs, il faut savoir dans l’occasion résister à tous les souverains, aux peuples aussi bien qu’aux rois. Le respect de l’histoire est à ce prix.

Eh bien ! moi, qui il y a trois mois vous eusse dit : résistez ! aujourd’hui je vous dis : cédez !

Pourquoi ?

Je viens de vous l’expliquer.

Parce qu’il y a trois mois le droit était de votre côté, et qu’aujourd’hui il est du côté du pays.

Et ces dix ou onze lois organiques que vous voulez faire, savez-vous ? vous ne les ferez même pas, vous les bâclerez. Où trouverez-vous le calme, la réflexion, l’attention, le temps pour examiner les questions, le temps pour les laisser mûrir ? Mais telle de ces lois est un code ! mais c’est la société tout entière à refaire ! Onze lois organiques, mais il y en a pour onze mois ! Vous aurez vécu presque un an. Un an, dans des temps comme ceux-ci, c’est un siècle, c’est là une fort belle longévité révolutionnaire. Contentez-vous-en.

Mais on insiste, on s’irrite, on fait appel à nos fiertés. Quoi ! nous nous retirons parce qu’un flot d’injures monte jusqu’à nous ! Nous cédons à un quinze mai moral ! l’assemblée nationale se laisse chasser ! Messieurs, l’assemblée chassée ! Comment ? par qui ? Non, j’en appelle à la dignité de vos consciences, vous ne vous sentez pas chassés ! Vous n’avez pas donné les mains à votre honte ! Vous vous retirez, non devant les voies de fait des partis, non devant les violences des factions, mais devant la souveraineté de la nation. L’assemblée se laisse chasser ! Ah ! ce degré d’abaissement rendrait sa condamnation légitime, elle la mériterait pour y avoir consenti ! Il n’en est rien, messieurs, et la preuve, c’est qu’elle s’en irait méprisée, et qu’elle s’en ira respectée !

Messieurs, je crois avoir ruiné les objections les unes après les autres. Me voici revenu à mon point de départ, le pays a pour lui le droit, et il a pour lui la raison. Considérez qu’il souffre, qu’il est, depuis un an bientôt, étendu sur le lit de douleur d’une révolution ; il veut changer de position, passez-moi cette comparaison vulgaire, c’est un malade qui veut se retourner du côté droit sur le côté gauche.

Un membre royaliste. — Non, du côté gauche sur le côté droit. (Sourires.)