Page:Hugo - Actes et paroles - volume 2.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
19
L’EXPÉDITION DE ROME.

M. de Givré. Messieurs, pour dire ma pensée tout entière, j’aurais préféré à cette lettre un acte de gouvernement délibéré en conseil.

M. Desmousseaux de Givré. — Non pas ! non pas ! Ce n’est pas là ma pensée ! (Nouveaux rires prolongés.)

M. Victor Hugo. — Eh bien ! je dis ma pensée et non la vôtre. J’aurais donc préféré à cette lettre un acte du gouvernement. — Quant à la lettre en elle-même, je l’aurais voulue plus mûrie et plus méditée, chaque mot devait y être pesé ; la moindre trace de légèreté dans un acte grave crée un embarras ; mais, telle qu’elle est, cette lettre, je le constate, fut un événement. Pourquoi ? Parce que cette lettre n’était autre chose qu’une traduction de l’opinion, parce qu’elle donnait une issue au sentiment national, parce qu’elle rendait à tout le monde le service de dire très haut ce que chacun pensait, parce qu’enfin cette lettre, même dans sa forme incomplète, contenait toute une politique. (Nouveau mouvement.)

Elle donnait une base aux négociations pendantes ; elle donnait au saint-siége, dans son intérêt, d’utiles conseils et des indications généreuses ; elle demandait les réformes et l’amnistie ; elle traçait au pape, auquel nous avons rendu le service, un peu trop grand peut-être, de le restaurer sans attendre l’acclamation de son peuple… (sensation prolongée) elle traçait au pape le programme sérieux d’un gouvernement de liberté. Je dis gouvernement de liberté, car, moi, je ne sais pas traduire autrement le mot gouvernement libéral. (Rires d’approbation.)

Quelques jours après cette lettre, le gouvernement clérical, ce gouvernement que nous avons rappelé, rétabli, relevé, que nous protégeons et que nous gardons à l’heure qu’il est, qui nous doit d’être en ce moment, le gouvernement clérical publiait sa réponse.

Cette réponse, c’est le Motu proprio, avec l’amnistie pour post-scriptum.

Maintenant, qu’est-ce que c’est que le Motu proprio ? (Profond silence.)

Messieurs, je ne parlerai, en aucun cas, du chef de la chrétienté autrement qu’avec un respect profond ; je n’oublie pas que, dans une autre enceinte, j’ai glorifié son