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L’EXPÉDITION DE ROME.

de toutes ces institutions devenues barbares. Il faut que la papauté arbore ce double drapeau cher à l’Italie : Sécularisation et nationalité !

Il faut que la papauté, je ne dis pas prépare dès à présent, mais du moins ne se comporte pas de façon à repousser à jamais les hautes destinées qui l’attendent le jour, le jour inévitable, de l’affranchissement et de l’unité de l’Italie. (Explosion de bravos.) Il faut enfin qu’elle se garde de son pire ennemi ; or, son pire ennemi, ce n’est pas l’esprit révolutionnaire, c’est l’esprit clérical. L’esprit révolutionnaire ne peut que la rudoyer, l’esprit clérical peut la tuer. (Rumeurs à droite. — Bravos à gauche.)

Voilà, selon moi, messieurs, dans quel sens le gouvernement français doit influer sur les déterminations du gouvernement romain. Voilà dans quel sens je souhaiterais une éclatante manifestation de l’assemblée, qui, repoussant le Motu proprio et adoptant la lettre du président, donnerait à notre diplomatie un inébranlable point d’appui. Après ce qu’elle a fait pour le saint-siége, la France a quelque droit d’inspirer ses idées. Certes, on aurait à moins le droit de les imposer. (Protestation à droite. — Voix diverses : Imposer vos idées ! Ah ! ah ! essayez !)

Ici l’on m’arrête encore. Imposer vos idées ! me dit-on ; y pensez-vous ? Vous voulez donc contraindre le pape ? Est-ce qu’on peut contraindre le pape ? Comment vous y prendrez-vous pour contraindre le pape ?

Messieurs, si nous voulions contraindre et violenter le pape en effet, l’enfermer au château Saint-Ange ou l’amener à Fontainebleau… (longue interruption, chuchotements)… l’objection serait sérieuse et la difficulté considérable.

Oui, j’en conviens sans nulle hésitation, la contrainte est malaisée vis-à-vis d’un tel adversaire ; la force matérielle échoue et avorte en présence de la puissance spirituelle. Les bataillons ne peuvent rien contre les dogmes ; je dis ceci pour un côté de l’assemblée, et j’ajoute, pour l’autre côté, qu’ils ne peuvent rien non plus contre les idées. (Sensation.) Il y a deux chimères également absurdes, c’est l’oppression d’un pape et la compression d’un peuple. (Nouveau mouvement.)