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AVANT L’EXIL. — ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE

comme dans l’intérêt de l’état. (Acclamation à gauche. ― Protestation à droite.)

Je viens de vous dire ce que je voudrais. Maintenant, voici ce que je ne veux pas :

Je ne veux pas de la loi qu’on vous apporte.

Pourquoi ?

Messieurs, cette loi est une arme.

Une arme n’est rien par elle-même, elle n’existe que par la main qui la saisit.

Or quelle est la main qui se saisira de cette loi ?

Là est toute la question.

Messieurs, c’est la main du parti clérical. (C’est vrai ! — Longue agitation.)

Messieurs, je redoute cette main, je veux briser cette arme, je repousse ce projet.

Cela dit, j’entre dans la discussion.

J’aborde tout de suite, et de front, une objection qu’on fait aux opposants placés à mon point de vue, la seule objection qui ait une apparence de gravité.

On nous dit : Vous excluez le clergé du conseil de surveillance de l’état ; vous voulez donc proscrire l’enseignement religieux ?

Messieurs, je m’explique. Jamais on ne se méprendra, par ma faute, ni sur ce que je dis, ni sur ce que je pense.

Loin que je veuille proscrire l’enseignement religieux, entendez-vous bien ? il est, selon moi, plus nécessaire aujourd’hui que jamais. Plus l’homme grandit, plus il doit croire. Plus il approche de Dieu, mieux il doit voir Dieu. (Mouvement.)

Il y a un malheur dans notre temps, je dirais presque il n’y a qu’un malheur, c’est une certaine tendance à tout mettre dans cette vie. (Sensation.) En donnant à l’homme pour fin et pour but la vie terrestre et matérielle, on aggrave toutes les misères par la négation qui est au bout, on ajoute à l’accablement des malheureux le poids insupportable du néant, et de ce qui n’était que la souffrance, c’est-à-dire la loi de Dieu, on fait le désespoir, c’est-à-dire la loi de l’enfer. (Long mouvement.) De là de profondes convulsions sociales. (Oui ! oui !)

Certes je suis de ceux qui veulent, et personne n’en