Page:Hugo - L'Année terrible, 1872.djvu/150

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Et le rayonnement du précipice attire.

Ceux-ci sacrifiant, ceux-là sacrifiés.

Cette croissance humaine où vous vous confiez
Sur nos difformités se développe et monte.
Destin terrifiant ! tout sert, même la honte ;
La prostitution a sa fécondité ;
Le crime a son emploi dans la fatalité ;
Etant corruption, un germe y peut éclore.
Ceci qu’on aime naît de ceci qu’on déplore.
Ce qu’on voit clairement, c’est qu’on souffre. Pourquoi ?
On entre dans le mieux avec des cris d’effroi ;
On sort presque à regret du pire où l’on séjourne.
Le genre humain gravit un escalier qui tourne
Et plonge dans la nuit pour rentrer dans le jour ;
On perd le bien de vue et le mal tour à tour ;
Le meurtre est bon ; la mort sauve ; la loi morale
Se courbe et disparaît dans l’obscure spirale.
A de certains moments, à Tyr comme à Sion,
Ce qu’on prend pour le crime est la punition ;
Punition utile et féconde, où surnage
On ne sait quelle vie éclose du carnage.
Les dalles de l’histoire, avec leurs affreux tas
De trahisons, de vols, d’ordures, d’attentats,
Avec leur effroyable encombrement de boue
Où de tous les Césars on voit passer la roue,
Avec leurs Tigellins, avec leurs Borgias,