Page:Hugo - L'Année terrible, 1872.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Nous puiserons en eux l’ardeur de châtier.
Sur ce hautain métal et sur ce marbre altier,
Oh ! comme on cherchera d’un œil mélancolique
Tous ces fiers vétérans, fils de la République!
Car l’heure de la chute est l’heure de l’orgueil;
Car la défaite augmente, aux yeux du peuple en deuil,
Le resplendissement farouche des trophées;
Les âmes de leur feu se sentent réchauffées;
La vision des grands est salubre aux petits.
Nous éterniserons ces monuments, bâtis
Par les morts dont survit l’œuvre extraordinaire;
Ces morts puissants jadis passaient dans le tonnerre,
Et de leur marche encore on entend les éclats;
Et les pâles vivants d’à présent sont, hélas!
Moins qu’eux dans la lumière et plus qu’eux dans la tombe.

Ecoutez, c’est la pioche ! écoutez, c’est la bombe
Qui donc fait bombarder ? qui donc fait démolir ?
Vous!

                         *

Le penseur frémit, pareil au vieux roi Lear
Qui parle à la tempête et lui fait des reproches.
Quels signes effrayants! d’affreux jours sont-ils proches ?
Est-ce que l'avenir peut être assassiné?