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Page:Hugo - L'Année terrible, 1872.djvu/288

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Des questions où nul encor ne pénétra
Pressent de tous côtés notre lugubre sphère ;
Et je ne pense pas qu’on se tire d’affaire
Par l’élargissement tragique du tombeau.

                         *

Le pauvre a le haillon, le riche a le lambeau,
Rien d’entier pour personne ; et sur tous l’ombre infâme.
L’amour dans aucun cœur, l’azur dans aucune âme ;
Hélas ! partout frisson, colère, enfer, cachot ;
Mais c’est si ténébreux que cela vient d’en haut.
L’esprit, sous ce nuage où tout semble se taire,
Sent l’incubation énorme d’un mystère.
Le fatal travail noir blanchira par degré.
Ce que nous rencontrons, c’est l’obstacle ignoré.
Les récifs montrent l’un après l’autre leurs têtes,
Car les événements ont leur cap des Tempêtes.
Derrière est la clarté. Ces flux et ces reflux,
Ces recommencements, ces combats, sont voulus.
Au-dessus de la haine immense, quelqu’un aime.
Ayons foi. Ce n’est pas sans quelque but suprême
Que sans cesse, en ce gouffre où rêvent les sondeurs,
Un prodigieux vent soufflant des profondeurs,
A travers l’âpre nuit, pousse, emporte et ramène
Sur tout l’écueil divin toute la mer humaine.