Page:Hugo - L'Année terrible, 1872.djvu/58

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Est-ce que d’une étoile on prononce l’arrêt ?
Qui donc le peut ? Qui donc a droit d’ôter au monde
Cette lueur sacrée et cette âme profonde ?
L’enfer semble une gueule effroyable qui mord.
Et l’on ne voit plus l’astre. Est-ce donc qu’il est mort ?

Tout à coup un rayon sort par une trouée.
Une crinière en feu, par les vents secouée,
Apparaît… - Le voilà !

C’est lui. Vivant, aimant,
Il condamne la Nuit à l’éblouissement,
Et, soudain reparu dans sa beauté première,
La couvre d’une écume immense de lumière.

Le chaos est-il donc vaincu ? Non. La noirceur
Redouble, et le reflux du gouffre envahisseur
Revient, et l’on dirait que Dieu se décourage.

De nouveau, dans l’horreur, dans la nuit, dans l’orage,
On cherche l’astre. Où donc est-il ? Quel guet-apens !
Et rien ne continue, et tout est en suspens ;
La création sent qu’elle est témoin d’un crime ;
Et l’univers regarde avec stupeur l’abîme
Qui, sans relâche, au fond du firmament vermeil,
Jette un vomissement d’ombre sur le soleil.