Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 1.djvu/100

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Il faisait moins froid dans la crique qu’en mer, grâce à l’écran de roche dressé au nord de ce bassin ; diminution qui n’empêchait pas ces gens de grelotter. Ils se hâtaient.

Les effets de crépuscule découpent les formes à l’emporte-pièce ; de certaines dentelures à leurs habits étaient visibles, et montraient que ces gens appartenaient à la classe nommée en Angleterre the ragged, c’est-à-dire les déguenillés.

On distinguait vaguement dans les reliefs de la falaise la torsion d’un sentier. Une fille qui laisse pendre et traîner son lacet sur un dossier de fauteuil dessine, sans s’en douter, à peu près tous les sentiers de falaises et de montagnes. Le sentier de cette crique, plein de nœuds et de coudes, presque à pic, et meilleur pour les chèvres que pour les hommes, aboutissait à la plate-forme où était la planche. Les sentiers de falaise sont habituellement d’une déclivité peu tentante ; ils s’offrent moins comme une route que comme une chute ; ils croulent plutôt qu’ils ne descendent. Celui-ci, ramification vraisemblable de quelque chemin dans la plaine, était désagréable à regar-