Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 1.djvu/145

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pandu, une fixité indicible où il y avait de la lueur et des ténèbres, et qui sortait du crâne et des dents aussi bien que des arcades sourcilières vides. Toute la tête du mort regarde, et c’est terrifiant. Pas de prunelles, et l’on se sent vu. Horreur des larves.

Peu à peu l’enfant devenait lui-même terrible. Il ne bougeait plus. La torpeur le gagnait. Il ne s’apercevait pas qu’il perdait conscience. Il s’engourdissait et s’ankylosait. L’hiver le livrait silencieusement à la nuit ; il y a du traître dans l’hiver. L’enfant était presque statue. La pierre du froid entrait dans ses os ; l’ombre, ce reptile, se glissait en lui. L’assoupissement qui sort de la neige monte dans l’homme comme une marée obscure ; l’enfant était lentement envahi par une immobilité ressemblant à celle du cadavre. Il allait s’endormir.

Dans la main du sommeil il y a le doigt de la mort. L’enfant se sentait saisi par cette main. Il était au moment de tomber sous le gibet. Il ne savait déjà plus s’il était debout.

La fin, toujours imminente, aucune transition entre être et ne plus être, la rentrée au creuset,