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Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 1.djvu/194

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le panneau de la fosse aux câbles, traversa le passavent et vint au gaillard de proue.

Il aborda le vieillard, mais non de face. Il se tint un peu en arrière, les coudes serrés aux hanches, les mains écartées, la tête penchée sur l’épaule, l’œil ouvert, le sourcil haut, un coin des lèvres souriant, ce qui est l’attitude de la curiosité, quand elle flotte entre l’ironie et le respect.

Le vieillard, soit qu’il eût l’habitude de parler quelquefois seul, soit que sentir quelqu’un derrière lui l’excitât à parler, se mit à monologuer, en considérant l’étendue.

— Le méridien d’où l’on compte l’ascension droite est marqué dans ce siècle par quatre étoiles, la Polaire, la chaise de Cassiopée, la tête d’Andromède, et l’étoile Algénib, qui est dans Pégase. Mais aucune n’est visible.

Ces paroles se succédaient automatiquement, confuses, à peu près dites, et en quelque façon sans qu’il se mêlât de les prononcer. Elles flottaient hors de sa bouche et se dissipaient. Le monologue est la fumée des feux intérieurs de l’esprit.