Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 4.djvu/150

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Bats-moi. Paye-moi. Traite-moi comme une créature. Je t’adore.

Les caresses peuvent rugir. En doutez-vous ? entrez chez les lions. L’horreur était dans cette femme et se combinait avec la grâce. Rien de plus tragique. On sentait la griffe, on sentait le velours. C’était l’attaque féline, mêlée de retraite. Il y avait du jeu et du meurtre dans ce va-et-vient. Elle idolâtrait, insolemment. Le résultat, c’était la démence communiquée. Fatal langage, inexprimablement violent et doux. Ce qui insultait n’insultait pas. Ce qui adorait outrageait. Ce qui souffletait déifiait. Son accent imprimait à ses paroles furieuses et amoureuses on ne sait quelle grandeur prométhéenne. Les fêtes de la Grande Déesse, chantées par Eschyle, donnaient aux femmes cherchant les satyres sous les étoiles cette sombre rage épique. Ces paroxysmes compliquaient les danses obscures sous les branches de Dodone. Cette femme était comme transfigurée, s’il est possible qu’on se transfigure du côté opposé au ciel.