Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 4.djvu/22

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au bout de la ruelle, prit une autre rue, puis une autre, retrouvant vaguement l’itinéraire par où il avait passé quelques heures auparavant. Par intervalles il se retournait, comme s’il pouvait encore voir la porte de la prison, quoiqu’il ne fût plus dans la rue où était la geôle. Peu à peu il se rapprochait du Tarrinzeau-field. Les lanes qui avoisinaient le champ de foire étaient des sentiers déserts entre des clôtures de jardins. Il marchait courbé le long des haies et des fossés. Tout à coup il fit halte, et se redressa, et il cria : — Tant mieux !

En même temps il se donna deux coups de poing sur la tête, puis deux coups de poing sur les cuisses, ce qui indique l’homme qui juge les choses comme il faut les juger.

Et il se mit à grommeler entre cuir et chair, par moments avec des éclats de voix :

— C’est bien fait ! Ah ! le gueux ! le brigand ! le chenapan ! le vaurien ! le séditieux ! Ce sont ses propos sur le gouvernement qui l’ont mené là. C’est un rebelle. J’avais chez moi un rebelle.